FLORILÈGE DE GRÜNFELD – QUATORZE

Publié le par ZEITNOT

florilège de grünfeld – quatorze

 

Mea culpa Une forte charge de travail m’a empêché de visiter ceux que j’apprécie.  

 

début en   FLORILÈGE DE GRÜNFELD - UN

 

Deux secondes et elle raccrocha, même brièveté pour l'appel suivant.

 

Presque autant d’uniformes que de voyageurs. On créait des points de contrôle, on examinait papiers et billets. même s’ils étaient en règle, on refoulait tous ceux dont le teint n’était pas assez clair vers le hall d’arrivée dont les grilles donnant sur la rue avaient été cadenassées. accéder aux quais n’était possible qu’après être passé devant les caméras que maniaient des vigiles appartenant à des sociétés privées. à chaque retard, à chaque annulation, la foule sifflait et braillait, des excités haranguaient leurs voisins, tisonnaient la colère et auguraient le chaos.  Des furieux voulaient faire un sort aux suspects en hurlant qu’il fallait en finir. Une bonne foi pour toutes ! Trois quadragénaires, genre chevillards endimanchés, s’en prenaient à une femme qui tenait Libération serré contre sa poitrine, les brutes voulaient lui faire bouffer son journal pourri et même lui fourrer dans son sale cul de socialo. À trois pas de l’agression, deux policiers brassardés cherchaient l’inspiration au plafond. En s’éloignant de la gare ils croisèrent une file de voitures dont les occupants agitaient des drapeaux tricolores, la police municipale facilitait la progression des héroïques patriotes.

 

Muets ils regagnèrent la gentilhommière. Comme lors des grèves, les radios nationales diffusaient un programme unique, mais copieusement ponctué de bulletins qu’un ton funèbre et un vocabulaire grandiloquent rendaient plus inquiétants. Les stations périphériques multipliaient les directs sur le terrain avec piaillements hystériques des reporters alors qu’au studio le chauffeur en chef entretenait le suspense. On sollicitait l’avis des auditeurs qui sans barguigner crachaient leur sottise et vomissaient leur haine, pas de notes discordantes. On n’avait plus que le mot nation à la bouche et la nation exigeait l’état d’urgence, la troupe à chaque coin de rue. La télévision n’était pas en reste… Images tressautantes, géographie chamboulée. On passait de Lyon à Meaux, de Lille à Tours, de Marseille à Dunkerque. Sur les plateaux pénurie de députés car ceux-la voulaient rester au contact de leurs chers concitoyens, pas de ministres non plus puisque tous mobilisés par d’épuisantes et interminables séances de travail, mais un aréopage d’experts entourant deux pythies sécuritaires : Alain Bauer et Xavier Raufer. Le couperosé rondouillard se voulait pédagogue et démontrait que si on l’avait écouté à propos de la vidéosurveillance*, on n’en serait pas là. Le moustachu grisonnant retrouvait les accents d’Ordre Nouveau et d’Occident pour vouer aux gémonies une populace dangereuse en truffant ses diatribes de sinistres, après le kalachnikov la bactérie. Même Pasqua fut convié, sans doute afin de terroriser les terroristes, il ne restait plus qu’à déterrer Pandraud et Papon.

 

Écoeurement, fatigue, besoin de respirer… Le soleil fendillait la glace du bassin, par endroits l’eau formait une pellicule argentée où se mêlait un peu de bleu, les pelouses buvaient le givre et la hêtraie craquait. Sous les fûts l’humus éveillait des odeurs froides et humides, quelques claquements résonnaient dans les branchages, des brindilles se détachaient et virevoltaient jusqu’au sol. Près d’un fourré de grandes pies jacassaient en se disputant un lapereau que la nuit avait tué.

 

Au journal de treize heures on hésitait entre les articles 16 et 38**. La jeune femme haussa les épaules et lui proposa de retourner à Nantes. Lorsqu’il la rejoignit le puissant bicylindre piaffait. 

 

À suivre, éventuellement…

 

* Le charmant personnage est actionnaire dirigeant dans une société qui prodigue des conseils fort onéreux et commercialise du matériel. On serait malveillant de croire que l'homme n'est pas un pur altruiste.

 

**Article 16

Lorsque les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité de son territoire ou l’exécution de ses engagements internationaux sont menacées d’une manière grave et immédiate et que le fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels est interrompu, le Président de la République prend les mesures exigées par ces circonstances, après consultation officielle du Premier ministre, des Présidents des assemblées ainsi que du Conseil constitutionnel. Etc.

Article 38

Le Gouvernement peut, pour l’exécution de son programme, demander au Parlement l’autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi .Etc.

 

J.S BACH Sonate en si mineur

L. KOGAN violon – V.YAMPOLSKY piano

http://www.youtube.com/watch?v=vYcGoCgaI4Y

http://www.youtube.com/watch?v=7T1VJVsLj5k

http://www.youtube.com/watch?v=s9KD-g0EaU0

http://www.youtube.com/watch?v=q4gURtob6dw

 

L’immense Kogan a enregistré l’intégrale des sonates pour violon et clavecin avec K.Richter.  

 

N.B. Les pires choses ayant une fin, je pense vous libérer de ce pensum au dix-septième épisode. Car dix-sept est nombre premier « famille » Eisenstein mais aussi nombre de Leyland…

 

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B
<br /> Mon ignorance est crasse mais le nombre de Leyland a-t-il un rappot avex le tuyas du m^me nom ?<br /> Comment trouverai je la patience d'attendre le 17 ?<br /> <br /> <br />
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